Formes du comique dans les Dialogues de Giovanni Pontano : entre sources antiques et arts du spectacle 

Formes du comique dans les Dialogues de Giovanni Pontano : entre sources antiques et arts du spectacle 

Projet de thèse de Gabriele Cascini, sous la direction de Hélène Casanova-Robin (Sorbonne Université) et Giuseppe Germano (Université de Naples - Federico II)

Les cinq dialogues latins de Giovanni Pontano (1429-1503), selon l'ordre traditionnel Charon, Antonius, Actius, Aegidius et Asinus, sont aujourd'hui évalués comme des chefs-d’œuvre de la littérature de la Renaissance. Cependant, la considération de leur valeur littéraire est une acquisition assez récente : à l’époque humaniste, en effet, la circulation du corpus s'arrête au milieu du XVIe siècle, lorsque l'expansion de la culture vernaculaire marque la disparition des grandes œuvres contemporaines en latin de la scène littéraire. Après les sept éditions publiées entre 1501 et 1520, il faudra attendre 1874 pour que le Charon soit publié en annexe d'une monographie savante.

Pontano écrit ses dialogues sur une période de trente ans (1470-1503), tout en effectuant à Naples le cursus honorum standard d’un homme de lettres à l’époque des principautés. D’abord au service d’Alphonse Ier d’Aragon, puis de son fils Ferrante, il participe à l’ambiance féconde de la cour aragonaise, où coexistent des niveaux culturels, intellectuels et sociaux très hétérogènes. Les Dialogi reproduisent cette variété en mettant en scène une pluralité de personnages et de situation dramatiques. Le groupe des sodales appartenant à l'Accademia Pontaniana est environné de types plus extravagants et populaires, tels que des musiciens, des saltimbanques et des poètes improvisateurs et le dialogue apparaît comme une confrontation entre différentes visions du monde, menée à travers une utilisation idiomatique de la parole. 

Le statut hybride du genre dialogique permet à Pontano de développer le discours à travers des modes dramatiques-performatifs qui reflètent, dans le texte écrit, les pratiques d'une culture encore fortement marquée par l'oralité. L'opération est menée principalement par l’imitatio de Plaute, auteur qui connaît une renaissance après son oubli médiéval : l'Humaniste concrétise ainsi une longue pratique de lecture du dramaturge antique, qui est élu au rang de véritable auctoritas. Outre les éléments plus génériquement structurels (situations comiques, temps comiques et scéniques, masques dramatiques, etc.), c’est la langue de Plaute qui inspire Pontano pour modeler sa propre langue, qui montre une intention mimétique de l’oralité. Le résultat est un pastiche, riche en expressions vernaculaires ainsi qu'en néologismes et archaïsmes, marqué par une varietas désignée comme critère stylistique dominant. 

Bien que la tradition critique du siècle dernier ait largement abordé la réception de Plaute au XVe et XVIe siècles, il existe encore peu de contributions qui évaluent de manière globale l’influence de l’œuvre du dramaturge ancien dans les Dialogues de Pontano. 

Tel est le premier objectif de cette thèse, dans laquelle nous tenterons d’analyser les modalités d'interaction de Pontano avec la comoedia, afin de mettre en lumière les motivations profondes de l'imitatio de Plaute, auteur qui n'était rentré que récemment dans le canon littéraire. Il sera important, dans cette première phase de travail, d'évaluer l'ampleur de l'influence de la comédie, non seulement en tant que réservoir linguistique et stylistique dans lequel puiser, mais aussi en tant que genre institutionnel : nous réfléchirons donc à l’organisation de la dramaturgie, à la structuration du monologue et du dialogue, à la reprise des masques et des situations comiques codifiées par la tradition. Cela nous permettra également de considérer les dialogues comme un point d’intersection entre l'ancien et le moderne. En mettant en relief le caractère cortigiano des Dialogues, dans la seconde partie de notre travail nous chercherons à évaluer le lien entre le comique pontanien et les arts du spectacle qui connaissent un développement considérable à la cour napolitaine au Quattrocento.