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École des langues anciennes de Sorbonne Université (Élasu)

Projet Etygram-D

Le projet Etygram-D, co-dirigé par A. Zucker (Université Nice – Côte d’Azur) et C. Le Feuvre (Sorbonne Université), entend développer une dynamique engagée dans le cadre de l’association Etygram (ETYmologies GRecques Antiques et Médiévales) autour des étymologies grecques dites « indigènes ». Il consiste en la constitution d’une base de données en ligne, en anglais, répertoriant et analysant les étymologies proposées par les Grecs pour les mots de leur langue depuis l’Antiquité jusqu’à l’époque byzantine.

Il s’agit pour chaque mot :

  1. de signaler toutes les étymologies qui ont été proposées, en identifiant leur première apparition dans les sources et en les classant par ordre chronologique, qu’elles apparaissent dans des lexiques spécialisés ou dans la littérature grecque en général (philosophes, médecins, historiens, dramaturges, poètes etc.).
  2. de traduire les sources nous transmettant ces étymologies, en anglais et éventuellement en une autre langue.
  3. de proposer une analyse de chacune de ces étymologies en montrant à quels principes formels et sémantiques chacune obéit, ce qu’elle indique de l’analyse linguistique synchronique et ce qu’elle révèle des conceptions et des connaissances de l’époque à laquelle elle est attestée.
  4. de montrer les relations qu’entretiennent deux étymologies différentes proposées pour un même mot, comment une étymologie peut donner naissance à une autre et comment une étymologie est proposée pour correspondre à un contexte d’emploi donné d’un mot.
  5. de montrer en quoi deux étymologies différentes proposées pour deux mots différents procèdent d’un même principe et d’une même méthode. 
  6. de mettre en regard les étymologies anciennes avec l’étymologie retenue par les linguistes modernes, qui obéit à des critères radicalement différents – mais qui parfois rejoint l’étymologie ancienne. Cela permet de mesurer la distance entre les deux méthodes ou à l’inverse de constater la justesse du raisonnement de certains étymologistes grecs.

L’originalité de ce projet est double : un traitement impartial de toutes les étymologies, quelle que soit leur valeur « scientifique » aux yeux des linguistes ; une ouverture à l’ensemble de la littérature et un repérage fin des étymologies “en passant”, voire des étymologies implicites. Aucun travail de ce type n’existe à l’heure actuelle : les éditions modernes des lexicographes ne s’intéressent en général qu’à la tradition grammaticale des Lexica et Etymologica, sans s’ouvrir à la littérature générale ; si elles recensent les occurrences et reprises de propositions étymologiques dans les lexiques étymologiques, elles n’incluent pas toutes les sources techniques et, surtout, elles ne tiennent pas compte d’occurrences éventuelles dans des sources non grammaticales, or ces dernières donnent justement la mesure de la diffusion de la pratique étymologique dans les cercles savants et parfois même sont antérieures aux attestations dans les sources grammaticales.

Ce projet comble aussi un manque d’accessibilité et de lisibilité d’un grand nombre de sources byzantines reposant sur une édition ancienne et dépourvues de traduction. C’est le cas de la plupart des éditions actuelles des grammairiens et lexicographes, qui sont d’interprétation difficile car la rédaction en est elliptique et pleine de termes techniques. Il s’agit donc de rendre pleinement accessible à un public plus large, par la traduction et les commentaires, des textes qui jusqu’ici ne sont accessibles qu’à des hellénistes chevronnés. Pour garantir une accessibilité la plus large possible, le lemme et l’étymon sont aussi donnés en translittération, en plus de la graphie originale, ce qui peut permettre même à un public ne connaissant pas le grec d’aborder ce type de sources.

Enfin, l’analyse formelle et sémantique des étymologies anciennes et leur contextualisation constituent un accompagnement scientifique indispensable à la compréhension de ces textes. C’est là le point essentiel du projet Etygram-D car les éditions des lexicographes ne fournissent pas d’analyse ni d’appareil explicatif. Ces étymologies qui, selon nos critères modernes, sont très souvent fantaisistes, ne font nulle part l’objet d’une analyse systématique qui s’attache à en montrer la cohérence et la logique dans le système auquel elles appartiennent et à dégager les principes qui les fondent. L’analyse proposée dans la base de données permet non seulement de comparer des étymologies différentes données pour un même lemme et de comprendre pourquoi pour les savants grecs plusieurs étymologies pour un même mot n’étaient pas incompatibles, mais aussi de comparer des étymologies de même type ou de même conception pour des lemmes distincts, lesquelles ne sont jamais mises en relation dans les éditions existantes.

Cette étude transversale est évidemment facilitée par l’informatique qui fournit des outils de navigation efficaces. Des liens internes permettent des renvois directs d’une notice à une autre, et une fonction Recherche permet de faire des requêtes d’auteur, de date, de mot (grec ou anglais), de notion linguistique, etc., y compris des recherches combinées à l’aide des opérateurs boléens, sur toute la base ou sur un champ donné. Cet outillage électronique, proposé dans une interface simple à manier, constitue une fonction essentielle qui n’existe pas dans les publications sur papier : les recherches transversales qu’il autorise permettent de faire apparaître des éléments nouveaux et débouchent sur des résultats inédits. Ces résultats feront l’objet de publication sous forme d’articles proposant une synthèse sur tel ou tel point théorique d’étymologie grecque ancienne, notamment dans le cadre des colloques organisés par l’association Etygram (premier colloque en 2016 à Beaulieu-sur-mer, actes à paraître chez de Gruyter en 2020 ; deuxième colloque en 2018 à Nice, actes en cours d’édition ; troisième colloque prévu en 2021 à Paris). Le dépouillement permet par ailleurs d’alimenter un dossier de textes théoriques grecs relatifs à l’étymologie, également en ligne, et de constituer un corpus exploitable, qui fait défaut pour le moment.

  • Philologie grecque
  • Philosophie du langage
  • Histoire des idées linguistiques et histoire de la grammaire
  • Histoire des sciences et des idées
  • Histoire de l’enseignement dans le monde gréco-romain
  • Enseignement du grec aujourd’hui : utilisation pédagogique de l’étymologie ancienne pour aborder sous un autre jour l’étude de la langue. Ce dernier point est en lien avec un autre projet de l’association Etygram, le projet Egascol (voir le site Etygram).

Le projet Etygram, dont Etygram-D est une des actions principales, a été lancé en 2016. La conception de la grille de saisie avec les différents critères a été achevée fin 2016 après une période de tests et la grille a subi quelques modifications mineures depuis. La base est pour le moment hébergée par l’Université de Nice – Côte d’Azur, sur le site de l’UMR 7264 CEPAM (Cultures et Environnements. Préhistoire, Antiquité, Moyen-Âge), et la maintenance est assurée par l’ingénieur en bases de données de l’UMR CEPAM.
La base de données est entièrement en accès libre.
Les notices sont rédigées en anglais pour une diffusion plus large. Les collaborations sont bienvenues, les notices étant relues et vérifiées avant publication en ligne par les deux responsables du projet.
A la date de soumission du projet (28 juin 2020), la base de données compte 397 notices pour 185 lemmes.